Fall; or Dodge in Hell de Neal Stephenson

Fall; or Dodge in Hell (2019)

Neal Stephenson - Fall; or Dodge in HellAprès avoir copieusement adoré le cyber shoot-out "Reamde" de Neal Stephenson, je me suis jeté dans la suite des aventures de Dodge, le personnage commun à ces 2 romans.
Intrigue:

Le milliardaire Richard "Dodge" Forthrast meurt suite à un banal contrôle de santé. Son testament révèle qu'il souhaite être cryogénisé et qu'à terme, que son cerveau soit "uploadé" dans le Cloud.
Outre les considérations juridiques et techniques pour conserver son corps, les nouvelles technologies de l'information bouleversent le champ du possible, et du réel: les réseaux sociaux règnent en maître et divisent encore plus la population.
Des années plus tard, le cerveau de Dodge est enfin scanné et ses synapses uploadés dans un serveur quantique mais les synapses semblent inertes. Sa petite-fille Sophia, scientifique à Princeton, décide pour sa thèse de travailleur sur ces synapses virtuels et de réveiller le cerveau.
Les premiers résultats sont encourageants et captivants, même si le cerveau uploadé semble être un goinfre d'énergie et de mémoire vive, et qu'il semble impossible de pouvoir communiquer avec lui, malgré une bonne représentation de ce que produit le cerveau virtuel dans cette matrice appelée "Bitworld".

Dans le même temps, Elmo Shepherd, le créateur de la digitalisation des âmes, et ancien détracteur de Dodge, met au point des serveurs plus puissants pour faire vivre ces cerveaux du futur, et cadrer les effets de bord de la croissance exponentielle des besoins des ceux-ci.
De nouveaux conflits juridiques interviennent entre les héritiers de Dodge et les avocats d'Elmo pour ne pas laisser libre cours à l'imagination débordante des premiers cerveaux digitalisés. malgré un statuquo entre les parties, c'est une fois mort, qu'Elmo et son âme digitalisé, viennent contre-carrer l'univers onirique qu'avait créé Dodge et les autres premières entités virtuels uploadés. Elmo, ayant plus d'argent et de pouvoir sur le "Bitworld", terrasse Dodge et règne en maitre sur cet univers onirique.
Ce n'est qu'une fois la mort de Sophia, la petite-fille de Dodge, que le règne d'El semble se fissurer. Et si Dodge revenait?


Remarque: lu en anglais

Ma note: ma note
Cela commence timidement avec la mort de Dodge et cela monte très vite en intensité dans une description sécessionniste apocalyptique du futur des USA, avant de s'échouer en longueur dans un univers Heroic-fantasy où les âmes digitales se confrontent, et se confondent dans une nouvelle mythologie digitale, amalgame de tous les mythes de notre monde réel, pour finir par une quête de la reconquête que les fans de Tolkien pourraient apprécier.

Je me demande si Neal Stephenson n'a pas voulu faire son Tolkien. Y'a des longueurs interminables sur l'univers onirique et la quête finale, malgré une trame intelligente et pertinente. Heureusement qu'il y a la première partie, décrivant une Amérique scindée en deux.

La création de l'Americanistan

Comme le personnage de Dodge, alias Egdod a fait fortune avec les début d'internet et le jeux en ligne, et que la technologie d'uploader son cerveau n'existe pas encore, l'auteur américain, a l'idée géniale de nous faire patienter en décrivant le futur proche de ce que sera, selon lui, le futur de ses compatriotes. Et là, une bonne tranche de rigolade nous attend, où le choc de visions viennent créer une synergie sécessionniste mettant fin aux USA.
D'une part, avec l'omni présence des réseaux sociaux et de leurs effets conspirationnistes où le sensationnel prend le pas sur le réel, et d'autre part, la division culturelle de l'Amérique profonde, ultra-conservatrice, face à la bourgeoisie progressiste des côtes Est et Ouest des USA.

De ceux phénomènes, l'auteur imagine donc la création d'une nouvelle nation au cœur des USA: l'Ameristan: un univers où la religion du flingue et du Christianisme ne font qu'un, amplifié par les réseaux sociaux mettant à vif le bon fondé de chacun de vivre comme il l'entend, mais pas sur le même territoire. L'auteur met en scène la plus grosse des fakenews, celle de l'explosion d'une bombe nucléaire (the "Mother Of All Bomb") au beau milieu des rocheuses à Moab (vrai ville des USA, là où personne n'ira vérifier). Ce passage est des plus jubilatoires, et une belle démonstration des dangers de ces fausses vérités.
Cet évènement est d'ailleurs le fait générateur de la scission du pays, où les red-necks, dans leurs pick-ups sur-armés, vivent comme des talibans dans le pays des "libertés", où ils vivent au rythme de la gâchette et des psaumes du Lévitique. Chuck Palahniuk avait fait fort avec son "Adjustment Day", et fort à parier que Neal Stephenson s'en ait inspiré! Bref, le premier tiers du livre se lit d'une traite et j'y ai pris un énorme plaisir, surtout que l'auteur fait ressurgir ce lutin d'Enoch Root et la fortune des Waterhouse (lire Cryptonomicon et la trilogie "The Baroque Cycle").
Dommage qu'une fois entré dans la matrice du Bitworld, je me suis perdu dans les méandres d'un récit tolkien cybernétique.

La création et la quête dans le Bitworld

La suite du livre est plus fastidieuse, voire soporifique, malgré une très trame pertinente et intelligente.
C'est donc bien des années plus tard, que le corps cryogénisé de Dodge (enfin, son cerveau, plus économique à conserver) est enfin scanné et uploadé dans un serveur quantique. Au début inerte, ce cerveau digitale s'éveille peu à peu, se découvre, et tente de comprendre sa situation. C'est ainsi que peu à peu il créé un univers ressemblant au jardin d'Eden. Le cerveau digitalisé n'a pas de souvenir de sa mort, ni une vraie conscience de l'être qui le portait et l'auteur imagine de manière crédible ce que serait un être doué de raison sans corps, ni passé. L'autre aspect ingénieux est la vitesse de pensée de ce cerveau digital, qui n'a pas de contrainte physique, empêchant toute communication avec l'extérieur, mais permettant aux humains, de suivre son évolution et ses créations. Et cette évolution est débordante. Elle nécessite sans cesse plus de ressources informatiques (énergie, mémoires vive et stockage) et nécessite donc un prix fort élevé pour vivre éternellement, et ce au détriment des humains, où l'énorme quantité de ces machines accentue les bouleversements climatiques, surtout que les humains du monde réel, se passionnent pour la vie dissolue de ces âmes digitiales. C'est ainsi que l'auteur imagine la mise en place d'une constellation de satellites-serveurs mis en orbite dans l'espace pour héberger la demande exponentielle de ce nouveau cloud, avec une éenrgie sans fin: celle du soleil et du refroidissement intersidéral.

Une fois le monde virtuel créé et l'arrivée d'autres personnalités digitalisés, avec en premier lieu l'arrivée du sombre Elmo Shepherd, résolu à prendre la place d'Edgod (le surnom de Dodge dans le Bitworld), l'auteur s'égare dans la construction d'un univers heroic-fantasy labyrinthique. On se croirait dans un jeu vidéo, et comme Tolkien, l'auteur américain s'égare à tout détailler son univers onirique, et il s'amuse à créer sa propre mythologie, en s'inspirant de toutes celles que nous connaissons.

Inutile de vous raconter la quête finale, avec la petite Sophia, désormais morte et uploadé dans Bitworld, bien décidée à terrasser le terrible et surpuissant El, pour enfin libérer Edgod.
Je n'ai pas vraiment accroché et le livre traine en longueur me faisant presque oublié l'univers dystopique tonitruant du début. Dommage!

Références:


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