Michel Houellebecq - Anéantir
Par Fred PARESY le lundi 9 mai 2022, 10:51 - Média - Lien permanent
Allez savoir pourquoi, j'ai jeté mon dévolu sur le dernier Michel Houellebecq!
Intrigue:A quelques mois avant les élections présidentielles du prochain quinquennat, Paul Raison, haut fonctionnaire, travaille au cabinet du ministre Bruno Juge, avec lequel il entretient également des liens d'amitié. Mais sa vie est d'une profonde monotonie: il continue de vivre avec sa femme alors qu'ils ne se parlent plus. Il semble passer au côté de sa vie et cela ne le dérange guère. Pourtant, quelques évènements vont basculer sa vie à tout jamais.
Tout d'abord le climat international et politique est marqué par l'apparition d'un étrange groupe terroriste, qui semble très puissant et qui agit sur les réseaux sociaux en ayant mis en scène la mort de son ministre; ministre qui devrait être proclamé comme le prochain candidat du parti, à moins que cela soit un outsider, qui, quoiqu'il en soit, devront lutter fermement contre la nouvelle figure montante du RN.
Mais le grand changement dans la vie de Paul est l'accident vasculaire de son père, ancien membre de la DGSI. Paul, qui était distant de son père et de sa famille, se retrouve et se pose enfin les questions existentielles sur sa vie.
Remarque: lu en audiobook
Ma note:
Ma critique:...
On m'avait suggéré de lire "Soumission" mais j'en avais fait fi. Et c'est en ayant vu l'adaptation en téléfilm des "Particules élémentaires" (1998) que j'ai apprécié le style narratif de l'auteur. Je me suis donc laissé allé à découvrir ce long roman fleuve sur la morne vie de Paul Raison.
J'avais en effet aimé cette misanthropie sous-jacente et ce délicat et subtil choix de mettre en lumière des personnages "à côté de leurs pompes" dans l'adaptation, et avec ce "Anéantir", j'ai été comblé sur toute la première partie du livre où l'on se délecte de la normalité singulière des différents personnages. Paul Raison est un vrai asocial, dépressif, incapable de communiquer franchement et simplement avec ces proches. De manière analytique mais aussi très chirurgicale, l'auteur français dévoile ce vide sidéral et en profite pour épingler notre société, son système de santé et ce fléau que va être le "papy-poom", la fin de l'ère des baby-boomers, cette génération qui refusent de voir plus loin que leur plaisir immédiat, et qui n'ont rien fait pour rendre vivable ces mourroirs dans lesquels ils vont finir leur vie. L'auteur français distille ainsi sa propre aversion qu'il a sur nos semblables et sur ce monde qui va de travers.
On découvre également la misogynie de l'auteur, que je ne connaissais pas. Tous les personnages féminins n'ont que des rôles de subalternes, où elles sont justes bonnes à faire le ménage, la cuisine, à torcher les vieux, et le soir venu, à se faire baiser. On les sent incapables d'agir, d'où cette tendance à prier ou à trouver de nouveau culte, pour que les choses s'améliorent. Cette vision est vraiment réactionnaire et vraiment dommage: on dirait parfois du Zemmour!
Revenons au livre où le début commence sur les chapeaux de roue avec 3 intrigues en parallèle. D'abord celle avec la mise en scène en vidéo ultra-réaliste de la mort par décapitation, du ministre Bruno Juge, à la tête Ministère de l'Économie, le mentor de Paul Raison. Cette vidéo qui semble plus que crédible, a été fomentée par un nouveau groupe terroriste, qui communique avec des cryptogrammes ésotériques, dont on ne sait rien. Le groupuscule semble doté de moyens conséquents pour avoir déjouer la sécurité de tous les systèmes.
La deuxième couche, et la plus importante dans la trame du roman, est l'accident vasculaire du père de Paul, ancien membre de la DGSI, qui continuait à travailler, à ses heures perdues, sur les théories complotistes et leurs nouvelles formes d'expression. Le lecteur le sait d'emblée: le père détient une des clés du mystère de ces néo-terroristes et on se demande quand le fils va découvrir les travaux de son père, surtout que les nouveaux attentats deviennent de plus en plus spectaculaires et hors du commun.
La troisième intrigue est enfin la campagne électorale, qui est encore à ses balbutiements: le personnage de Bruno Juge, qui fait référence à Bruno Le Maire (Ministre de l'Économie, des Finances et de la Relance au moment de la parution du roman) L'auteur dépeint le ministre comme un personnage droit, bourru de travail et assez distant des autres. Enfin, au milieu de tout cela, il y a le quotidien de Paul, une vie morne qui se retrouve toute chamboulée par ces évènements.
J'ai donc été tenu en haleine une bonne partie du roman avec ces intrigues imbriquées. Mais au fil du léger et long rétablissement du père de Paul, le roman se tarie. La verve de l'écrivain se meurt au fur et à mesure que Paul retrouve un semblant de normalité. Ce pavé est à l'image d'un film rive-gauche: on entre dans la vie d'un personnage qui ouvre un porte, jusqu'à ce qu'il sorte du champs, et ce au bout de plus de 730 pages.
Et c'est cela la magie de la littérature: de nous embarquer dans un futur proche qui pourrait bien devenir une réalité, de prendre raison pour les combats de la famille et de se lamenter sur le sort de notre société et de ce pauvre personnage, mais au final, ce livre nous laisse une étrange frustration et insatisfaction. Le cœur de l'histoire est bien celle de Paul et de sa morne vie, et rien d'autre. Michel Houellebecq réussie le pari de capter aussi longuement notre attention sur la vacuité d'un être.
Commentaires
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